• 139 ans et toujours d'actualité

    Fin 1878, Engels rédige, en son nom et au nom de Marx, une lettre-circulaire adressée aux chefs du parti social-démocrate allemand ; dans la lettre d’accompagnement, Marx caractérise ainsi l’attitude de ses dirigeants :


    « Ils sont atteints de crétinisme parlementaire au point de se figurer qu’ils sont au-dessus de toute critique et de condamner la critique comme un crime de lèse-majesté ! »


    […] La social-démocratie (…) est-elle réellement infectée de la maladie parlementaire et croit-elle que, grâce au suffrage universel, le saint esprit se déverse sur les élus, transformant les séances des fractions en conciles infaillibles et les résolutions des fractions en dogmes inviolables ? […]


    À en croire ces messieurs, le parti social-démocrate ne doit pas être un parti exclusivement ouvrier, mais un parti universel, ouvert à « tous les hommes remplis d’un véritable amour pour l’humanité ». Il le prouvera avant tout en abandonnant les vulgaires passions prolétariennes et en se plaçant sous la direction de bourgeois instruits et philanthropes « pour répandre le bon goût » et « pour apprendre le bon ton » […] Alors viendront s’y joindre de « nombreux partisans appartenant aux sphères des classes instruites et possédantes. Il faut d’abord gagner ceux-ci à notre cause, avant que notre agitation obtienne des résultats tangibles ».

     
    Bref : la classe ouvrière, par elle-même, est incapable de s’affranchir. Elle doit donc passer sous la direction de bourgeois « instruits et aisés » qui seuls « ont l’occasion et le temps » de se familiariser avec les intérêts des ouvriers.


    Quand on écarte la lutte de classe comme un phénomène pénible et « vulgaire », il ne reste plus au socialisme que de se fonder sur le « vrai amour de l’humanité » et les phrases creuses sur la « justice ».


    C’est un phénomène inévitable, inhérent à la marche de l’évolution, que des individus appartenant à la classe dominante viennent se joindre au prolétariat en lutte et lui apportent des éléments constitutifs. Nous l’avons déjà dit dans le Manifeste communiste, mais il a ici deux observations à faire :


    Premièrement : ces individus, pour être utiles au mouvement prolétarien, doivent vraiment lui apporter des éléments constitutifs d’une valeur réelle. Ce n’est pourtant pas le cas de la grande majorité des convertis bourgeois (…)


    Au lieu de quoi, des tentatives pour mettre en harmonie les idées socialistes superficiellement assimilées avec les opinions théoriques les plus diverses que ces messieurs ont ramenées de l’université ou d’ailleurs (…)


    Deuxièmement : lorsque ces individus venant d’autres classes se joignent au mouvement prolétarien, la première chose à exiger est qu’il n’y fassent pas entrer les résidus de leurs préjugés bourgeois, petits-bourgeois, etc., mais qu’ils fassent leurs, sans réserve, les conceptions prolétariennes […]


    Quant à nous, d’après tout notre passé, une seule voie nous reste ouverte. Nous avons, depuis presque quarante ans, signalé la lutte de classe comme le moteur de l’histoire le plus décisif et nous avons notamment désigné la lutte sociale entre la bourgeoisie et le prolétariat comme le grand levier de la révolution sociale moderne. Nous ne pouvons donc, en aucune manière, nous associer à des gens qui voudraient retrancher du mouvement cette lutte de classe. Nous avons formulé, lors de la création de l’Internationale, la devise de notre combat : l’émancipation de la classe ouvrière sera l’œuvre de la classe ouvrière elle-même. Nous ne pouvons, par conséquent, faire route commune avec des gens qui déclarent ouvertement que les ouvriers sont trop incultes pour se libérer eux-mêmes, et qu’ils doivent être libérés par en haut, c’est-à-dire par des grands et petits bourgeois philanthropes […]

     

    ENGELS


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